Inscrit le: 26 Avr 2007 Messages: 44 Localisation: dans le monde des Mages
Posté le: Lun Juin 25, 2007 2:54 pm Sujet du message: Gatsby le Magnifique - Francis Scott Fitzgerald
Francis Scott Fitzgerald, Gatsby le Magnifique, 1925.
(Livre de poche, traduction de Michel Tournier.)
L'histoire...
En 1922, Nick Carraway, le narrateur, loue une maison à Long Island. Son mystérieux voisin, Gatsby, donne des fêtes somptueuses dans son extravagante maison de West Egg, mais la rumeur lui prête un passé d'arriviste, voire de criminel. Nick se lie d'amitié avec Gatsby et découvre que cette vie fastueuse masque le désir de Gatsby de reconquérir la cousine de Nick, Daisy, mariée au millionnaire Tom Buchanan.
Mon avis
Un grand classique de la littérature américaine que je voulais lire depuis très longtemps !
Le lecteur suit la narration de Nick Carraway et devient un spectateur complice. Les lieux et les ambiances sont retranscrits dans des descriptions équilibées, aux détails jamais lassants. Fitzgerald suggère et le lecteur devine ; on apprécie les ellipses subtiles de Fitzgerald pour éviter la censure. Cette crainte est évoquée dans la correspondance entre l'auteur et son éditeur, présentée à la fin du roman.
Dans ces lettres, (vraiment intéressantes à découvrir car elle montrent comment l'auteur a construit et retravailler son livre), on apprend que Fitzgerald souhaitait éviter que son roman soit simplement présenté comme "un tableau de la vie à New York, même si, étant donné que c'est exactement de quoi il retourne dans le livre, ce sont des phrases difficiles à éviter"
"Gatsby le magnifique" est effectivement bien plus que cela : c'est un drame sur l'amour, l'amitié, la solitude, la futilité, l'abandon... Gatsby apparaît vite comme un personnage fascinant, puis touchant. Les autres personnages, le sont tout autant : Daisy, confrontée au choix entre un mari qui la trompe et son ancien amour ; Nick, la narrateur, plus enclin à rester dans le rôle de confident qu'à intégrer cette société mondaine.
Outre la narration original, le style se modèle sur l'intrigue : poétique et fluide dans les descriptions, rapide et rythmée sur les dialogues.
Daisy "C'était l'une de ces voix dont l'oreille épouse chaque modulation, car elles improvisent de phrase en phrase une suite d'accords de hasard que personne jamais ne rejouera plus"
Gatsby "Il reculait un peu plus chaque nuit la frontière de ses chimères, en attendant que le sommeil, par une étreinte sans mémoire, interrompe une scène éblouissante. Ces fantasmes ont servi un temps d'exutoire à son imagination. Ils faisaient contrepoids à la l'irréalité de la réalité, lui laissant croire que ce caillou qu'est notre terre reposait en sécurité sur les ailes d'une fée."
Petite remarque pour ceux qui, (comme moi... ) n'ont pas lu le livre avant de voir le film Gatsby le Magnifique de Jack Clayton (1974) :
C'est une fidèle adaptation du roman, portée par les interprétations de Robert Redford (Gatsby) et Mia Farrow (Daisy). L'esthétique est travaillée, mais la réalisation reste le plus souvent trop lente (à moins tout simplement que ce film, marqué par son époque, les années 70, n'est tout simplement "mal vieilli"...) alors, je conseillerais de ce plonger dans le livre
En fait, le lecteur ne sait pas grand-chose du personnage de Gatsby, lequel ne nous est présenté que par des personnages qui en ont entendu parlé ou au mieux contré aux fêtes qu'il donne, mais jamais par personne qui le connaisse vraiment. Gatsby est donc présenté comme un personnage mystérieux sur lequel circulent les pires rumeurs, ce qui n'empêchent pas le mondains pique-assiette de se rendre aux fêtes somptueuses qu'il donne.
C'est le drame d'un personnage en réalité réaliste, amoureux fou d'une femme superficielle, qui fait tout pour la séduire.
Le narrateur est témoin de cette histoire dramatique. Le livre décrit une société matérialiste, superficielle et hypocrite, plongée dans une atmosphère plombante d'ennui. Je me souviens d'un passage où Daisy s'écrit : "Mais que va-t-on faire aujourd'hui? Et demain? Et tous les jours qui nous restent à vivre?" (citation de mémoire, hein.)
L'ennui est tellement bien rendu que je me suis parfois ennuyée à la lecture de certaines pages... et j'avais envie de gifler Daisy. Mais avec le recul, je trouve que c'est un grand livre. _________________ Garde tes songes ;
les sages n'en ont pas d'aussi beaux que les fous!
Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Ven Avr 10, 2009 8:27 pm Sujet du message:
Bof, je n'ai pas été emballée par ce roman. C'est long, les personnages sont peu sympathiques (même Nick et Gatsby, je trouve). Seul bon point : c'est assez court... _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Inscrit le: 23 Aoû 2008 Messages: 298 Localisation: Au coeur des choses
Posté le: Dim Avr 12, 2009 12:25 am Sujet du message:
Beau livre (mon préféré reste "tendre est la nuit") mais il est vrai que l'univers de Fitzgerald est quelque peu désespérant et rend compte, comme Anitak et Carrabas le soulignent, de la fatuité d'un monde très artificiel (la jet set de l'époque). _________________ L'un pour lire tourne le dos à la vie et l'autre, résolu à s'y épanouir, lui accorde un moment d'attention.
Posté le: Dim Déc 05, 2010 1:48 pm Sujet du message:
J'étais passionné par le livre jusqu'à découvrir le personnage de Gatsby. Ce moment là a cassé le mythe. Ensuite on rentre dans une histoire un peu bancale, ou l'intérêt du début n'est plus là, ou les personnages deviennent tous peu à peu agacant. Malgré tout ça, globalement, j'ai apprécié cette lecture, nottamment avec cette fin plutôt inattendu pour ma part.
Inscrit le: 02 Jan 2012 Messages: 36 Localisation: Nord
Posté le: Lun Jan 23, 2012 10:05 pm Sujet du message:
Je partage les avis d'Anitak et Carabas, à la seule nuance que ce livre ne m'a pas ennuyé un seul instant. En lisant Gatsby, j'ai avant tout découvert un auteur, dont le style m'a plu dès les premières pages. J'ai d'ailleurs hâte de lire d'autres de ces romans...
J'ai trouvé dans sa façon d'écrire quelque chose qui m'a touché, quelque chose d'émouvant. Plutôt que de m'attacher à l'histoire, je me suis avant tout éprise de l'ambiance que l'on trouve dans cet écrit. Mêlant amour et désuétude, futilité et hypocrisie de ces jeunes riches à l'apparence heureuse, ce roman m'a rendu quelque peu mélancolique. Comme si ce fond de sentiments gâchés et de faux-semblants était l'un de mes propres souvenirs.
Voici quelques passages qui m'ont particulièrement plu :
- Il me sourit avec une sorte de complicité - qui allait au-delà de la complicité. L'un de ces sourires singuliers qu'on ne rencontre que 5 ou 6 fois dans une vie, et qui vous rassure à jamais. Qui, après avoir jaugé - ou feint peut-être de jauger - le genre humain dans son ensemble, choisit de s'adresser à vous, poussé par un irrésistible préjugé favorable à votre égard. Qui vous comprend dans la mesure exacte où vous souhaitez qu'on vous comprenne, qui croit en vous comme vous aimeriez croire en vous-même, qui vous assure que l'impression que vous donnez est celle que vous souhaitez donner, celle d'être au meilleur de vous-même.
- Je me suis retourné une dernière fois. La lune, ronde et blême comme une hostie, surmontait la demeure de Gatsby et ses jardins encore illuminés, et rendait à la nuit sa pureté intacte, que les rires et les clameurs qui s'étaient élevés vers elle n'avaient pas réussi à corrompre. Une solitude brutale semblait sourdre des portes et des hautes fenêtres, nimbant d'un halo de vide absolu la silhouette du maître de maison, immobile sur son perron, la main levée en un geste d'adieu de pure forme.
- Après une période d'angoisse maladive, suivie d'une période de joie délirante, il était maintenant bouleversé par le miracle d'une présence. Cette attente l'habitait depuis si longtemps, il l'avait si souvent imaginée, du début à la fin, dans ses moindres détails, attendue dents serrées, peut-on dire, avec un tel acharnement, qu'il s'en trouvait par réaction comme annihilé - une pendule dont on aurait trop tendu le ressort.
- Cela tenait à la colossale vigueur de son aptitude à rêver. Il l'avait projetée au-delà de Daisy, au-delà de tout. Il s'y était voué lui-même avec une passion d'inventeur, modifiant, amplifiant, décorant ses chimères de la moindre parure scintillante qui passait à sa portée. Ni le feu ni la glace ne sauraient atteindre en intensité ce qu'enferme un homme dans les illusions de son cœur.
Et enfin je ne peux conclure qu'en citant Jean-Revel, auteur d'une des préfaces de 1962, dont l'avis est si juste que je ne trouve nul besoin de le reformuler :
Citation:
Gatsby, ce roman d'amour, où l'on ne sent jamais l'amour mais seulement l'argent qui le permet ou qui l'empêche, est fait d'un grand sujet qui s'appuie sur une exécrable histoire : on frémit à l'idée de ce qu'aurait pu donner, entre des mains grossières, cette affabulation mélodramatique et même rocambolesque. Preuve que d'une intrigue quelque peu artificielle, qui pourrait être un mauvais scénario, la vérité pure peut émerger par l'effet de l'irréfutable qualité de chaque détail : beauté des sensations, des descriptions, , des couleurs et des lumières, des robes et des rideaux, des bruits de voix, des impressions de froid, de chaleur, de jour, de nuit, des passages de l'intérieur à l'extérieur des maisons et inversement. La liste des hauts et des bas. Contours nocturnes de photo détourée, palpitations diurnes de stores qu'agite le vent dans la fournaise caniculaire. Multitude nette des figurants autour du flou des personnages centraux. Et à travers tout cela, une petite voix douce et persistante, celle de Gatsby avec ce tic, qui se veut oxfordien, d'appeler tout le monde " old sport" : you're selling bonds, aren't you, old sport ? - Old sport ! Cette expression factice, si peu américaine, et si nécessaire au personnage de Gatsby, - être un romancier, pour moi, c'est d'abord trouver ça.
_________________ Lorsqu'un beau fait est répété, il commence à fleurir, et quand les auditeurs se répandent en louanges, alors les fleurs s'épanouissent. Les Lais de Marie de France
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