Inscrit le: 26 Avr 2007 Messages: 840 Localisation: France
Posté le: Jeu Oct 04, 2007 5:53 pm Sujet du message: Ivanhoe - Walter Scott
J'ai lu Ivanhoé pour la première fois alors que je devais avoir 12-13 ans et le livre m'a beaucoup plu. Ce que je n'ai pas réalisé à l'époque (et que je n'ai à vrai dire découvert qu'assez récemment), c'est qu'il s'agissait d'une version à destination des enfants et très largement amputée par rapport au texte d'origine. Les descriptions denses et nombreuses ont été sabrées et certains passages sont omis ou très simplifiés, ce qui donne un texte trois fois plus court que l'original. Si j'avais lu l'oeuvre complète lorsque j'étais enfant, il est très probable qu'elle m'aurait vite lassé mais, devenu adulte, j'étais enfin à même d'apprécier toute la richesse du roman de Walter Scott.
Ivanhoé se déroule sous le règne de Richard Coeur-de-Lion, à l'époque où celui-ci est retenu à l'étranger et où c'est son frère, le Prince Jean, qui gouverne le pays à sa place. Oui, c'est comme dans les films sur Robin des Bois. D'ailleurs, Robin débute plus ou moins sa carrière littéraire dans ce roman.
La conquête de l'Angleterre ne remonte qu'à quelques générations et l'animosité entre les Normands et les Saxons est encore fraîche (les historiens contestent généralement la vision de Walter Scott sur ce point, mais bon, on sait ce que Dumas disait de la façon dont il faut respecter l'Histoire). Les nobles normands dédaignent les Saxons, qui ont perdu l'essentiel de leur pouvoir et de leurs possessions. Les Saxons, à défaut d'avoir un monarque qui soit des leurs, espèrent du moins le retour de Richard, qu'ils préfèrent à son frère. Le Prince Jean, bien sûr, ne serait pas trop chagriné si son royal aîné restait emprisonné à l'étranger ou venait à connaître un accident fâcheux sur le chemin du retour.
C'est dans ce contexte que le jeune Wilfrid d'Ivanhoé, fils de l'un des rares nobles saxons à conserver encore une certaine puissance, rentre incognito de la croisade où il avait accompagné Richard. Son père, Cédric, est surnommé "le Saxon" pour son patriotisme anti-Normands extrêmement prononcé. Il a renié Wilfrid parce que celui-ci avait prêté allégeance à Richard, un monarque normand, et qu'il flirtait un peu trop avec la pupille de Cédric, la belle Rowena. Wilfrid est décidé à cacher son identité tout en accumulant toute la gloire possible et en attendant le retour de Richard.
Diverses complications vont s'ensuivre, impliquant notamment Brian de Bois-Guilbert, un templier et ennemi juré d'Ivanhoé, Isaac, un usurier juif dont la fortune fait l'objet de toutes les convoitises, et Rebecca, la fille d'Isaac. Le lecteur a droit à un tournoi, au siège d'un château et à un duel judiciaire.
Ivanhoé est le roman d'aventure médiéval par excellence. Il plonge totalement son lecteur dans l'univers des chevaliers, des nobles, des batailles et des festins. Les descriptions très riches rendent un tableau extrêmement vivant des événements du roman et, de façon plus large, de l'époque toute entière. Walter Scott dépeint de superbe façon la chevalerie, mais ne l'idéalise pas pour autant.
Les personnages du roman sont extrêmement intéressants, d'autant qu'ils sont souvent très contrastés : ni totalement bons, ni totalement abjects. Par exemple, Cédric (un prénom que l'on doit entièrement à Walter Scott, soit dit en passant) est un homme idéaliste et courageux, doté d'un très fort sens de l'honneur et d'une grande générosité, ce qui ne l'empêche pas d'être orgueilleux, dur et étroit d'esprit. Ivanhoé lui-même n'est pas exempt de défaut : il sauve Isaac vers le début du livre, mais cela ne l'empêche pas de partager les préjugés de son époque envers les Juifs. Rebecca est peut-être le seul personnage à n'avoir pas vraiment de défaut prononcé.
Même Richard Coeur-de-Lion n'est pas épargné. Walter Scott porte sur lui un regard équilibré : il valorise ses qualités chevaleresques, mais souligne ses insuffisances en tant que monarque.
Bref, un roman qui cumule une action palpitante, une atmosphère dans laquelle on s'immerge promptement et des personnages étonnamment riches (le plus intéressant à mon goût étant Brian de Bois-Guilbert). Classique et distrayant, que demander de plus ?
Posté le: Dim Oct 07, 2007 2:18 pm Sujet du message:
Super souvenir de lecture, super souvenir de film. Mon seul regret : l'avoir lu en bibliothèque verte, et je crains que le texte ne soit pas intégral.
<message type="haineux" scope="ne faites pas attention">on devrait pendre les éditeurs qui coupent les textes</message> _________________ En cours de lecture : Le Mythe de Sisyphe, d'Albert Camus
Inscrit le: 30 Juin 2004 Messages: 5671 Localisation: Physiquement : Cergy, France. Mentalement : MIA
Posté le: Dim Oct 07, 2007 7:30 pm Sujet du message:
Turb a écrit:
<message type="haineux" scope="ne faites pas attention">on devrait pendre les éditeurs qui coupent les textes</message>
Avec les tripes des éditeurs qui publient en 3 volumes GF écris gros ce qui n'en faisait qu'un à l'origine... _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Posté le: Sam Aoû 23, 2008 12:18 pm Sujet du message:
en verte, il n'était pas intégral mais dans le tout Stevenson de Bouquins tu l'avais, ainsi que Quentin Durward (passionnant) et le maître de Ballantrae (une marveille) _________________ EGOLAND
Posté le: Mer Mar 09, 2011 11:01 am Sujet du message: Re: Ivanhoe - Walter Scott
Outremer a écrit:
La conquête de l'Angleterre ne remonte qu'à quelques générations et l'animosité entre les Normands et les Saxons est encore fraîche (les historiens contestent généralement la vision de Walter Scott sur ce point, mais bon, on sait ce que Dumas disait de la façon dont il faut respecter l'Histoire).
C'est effectivement très généreux d'avoir ouvert ce sujet dans la section « Autour de l'histoire », parce que les anachronismes s'enchaînent avec autant de rythme que les péripéties ! Une bonne moitié des notes éditoriales de mon édition leur sont consacrées (l'autre moitié se contentant d'indiquer les références des innombrables citations bibliques de Scott).
Mais ça reste un bon livre, que j'aurais dû lire plus tôt. Quoique mon intérêt se soit quelque peu relâché sur la fin, après
Spoiler:
la résurrection surprise d'Athelstane
: c'est franchement trop pour ma suspension d'incrédulité.
Inscrit le: 04 Avr 2005 Messages: 6326 Localisation: Sud
Posté le: Jeu Déc 26, 2013 6:20 pm Sujet du message:
Eh bien, quoi que j'en aie dit il y a 6 ans, je ne me suis pas pressée, mais mieux vaut tard que jamais ! Je me suis régalée à cette "lecture" (je l'ai en fait écouté en audio-livre, d'où les guillemets), et je suis d'accord avec Outremer, même si ma suspension d'incrédulité a souffert pour la même raison que Meneldur :-D. Il est compréhensible que ce roman soit resté comme LE classique des romans d'aventures médiévales, car vraiment tout y est, y compris les héros "sans peur et (presque) sans reproche". Une excellente distraction pour les lecteurs de tous âges. _________________ Même le soleil se couche.
Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Sam Jan 25, 2014 10:05 pm Sujet du message:
Bon, je m'y suis remise aussi, je viens de le finir.
C'est excellent, assez proche de mon souvenir.
J'ai quand même quelques regrets : parfois trop de blabla à mon goût, dans de longues explications historiques ou des descriptions un peu trop longues pour moi. On alterne trois ou quatre grands moments d'action avec de longs passages plus ennuyeux.
Par contre, il y a quelque chose qui m'a énormément crispée, c'est la traduction. Selon les chapitres, j'ai lu sur mon PC une traduction d'Alexandre Dumas à laquelle je n'ai rien à redire, ou sur ma liseuse une traduction d'Albert Montémont. Ce type fait sans arrêt des notes (que je ne peux éviter sur ma liseuse car elles sont insérées dans le texte) qui me le rendent détestable, car il souligne sans relâche la moindre imperfection du texte ou de la traduction précédente (celle de M. Defauconpret), pour nous prouver que lui est bien plus savant et intelligent. Il déteste notamment la façon négative dont Walter Scott montre les templiers, et le fait savoir. Il relève la moindre erreur orthographique, la moindre traduction trop éloignée de l'original à son goût (et il y en a beaucoup). Je me serais parfaitement portée d'ignorer que le précédent traducteur avait jugé bon de traduire de manière totalement fausse ce qui aurait du être "une aune" par "trois pieds"... Sur moi, ces râleries dignes d'une cour de récré ont l'effet immédiat de m'exaspérer et de me rendre ce traducteur odieux. J'aurais largement préféré lire entièrement la traduction de quelqu'un d'autre !
Quelques exemples de notes où il descend l'auteur en flèche :
Citation:
38. Il est ici question du manteau des templiers ; c’est sans doute par erreur que Walter Scott y place la croix sur l’épaule droite, car le costume la représente sur l’épaule gauche, et elle est marquée en étoffe noire ou rouge sur blanc, au lieu de l’être en blanc sur noir.
52. On voit ici combien le romancier calédonien paie tribut aux passions. Il traite fort mal les templiers ; il les juge d’après les calomnies des moines, leurs plus cruels ennemis.
57. Le Bauséant, que par erreur Walter Scott écrit Beaucéan, était, dit-il, le nom de la bannière des templiers, laquelle était moitié noire, moitié blanche, pour ajouta-t-il, qu’ils étaient aussi bons et candides envers les chrétiens, que noirs c’est-à-dire terribles, envers les infidèles. Cette explication de l’emblème est exacte mais ici l’écrivain anglais confond, et prend un étendard pour l’autre. Les templiers en avaient deux : le Drapeau de guerre, ou Vexillum belli, et le Baucéan ou Baucennus. Celui-ci était blanc, chargé d’une croix gironnée de gueules ou rouge, formée de quatre triangles ; l’autre était blanc, chargé de quatre pals de sable ou noirs
82. L’interlocuteur a une bien fausse idée de cette morale, et Walter Scott le fait parler d’après les ennemis les plus acharnés des templiers, ainsi qu’eussent parlé les bourreaux à la solde de Philippe-le-Bel.
83. Voilà une calomnie gratuite comme toutes les précédentes et comme beaucoup d’autres qui vont suivre. Sir Walter Scott les a trouvées dans les écrits des moines ; mais sa raison judicieuse aurait dû faire la part des temps et des positions respectives.
125. Notre auteur se trompe : les préceptoreries des chevaliers templiers étaient de grandes divisions territoriales.
Bref, un seul conseil : évitez la traduction d'Albert Montémont !!! _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
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