Pavane - Keith Roberts

[Jaipadepseudo]

Première édition en 1966.

Pavane: Ancienne danse ( et musique de celle-ci), de caractère lent et solennel, en vogue au XVIème et XVIIème siècles.

Bouquin trouvé dans un rayonnage SF peu fourni d'une communauté Emmaüs dans mes contrées. J'ai tout de suite été attiré par la couverture, la lecture du résumé de quatrième de couv' m'a emballé, je vous le livre:

L'histoire:

Si la reine Elisabeth 1ère avait péri en 1588 sous le couteau d'un assassin, si l'Invincible Armada avait triomphé de la tempête et vaincu, l'histoire aurait suivi un autre cours où la papauté l'aurait emporté, où le progrès technique aurait été condamné comme démoniaque.
Au XXème siècle, des locomotives à vapeur tirant jusqu'à cinq wagons disputent les routes aux cavaliers; les nouvelles sont transmises par des réseaux de sémaphores; on chasse les sorcières et les seigneurs féodaux appuient leurs révoltes sporadiques de sciences impies et hérétiques comme l'électricité et la chimie.
Mais l'histoire, imperturbable, entraîne dans sa pavane peuples et rois, humbles et riches, filles et garçons.


Mon avis ( ou plutôt mes avis)

Pavane est un recueil qui rassemble 6 nouvelles. Je dois avouer que j'ai eu un peu de mal à entrer dans l'univers uchronique de Roberts. Le prologue de l'auteur jette pourtant des bases attirantes de l'histoire qu'il détourne. Celles-ci créent une irrésistible envie de rentrer dans le vif du sujet. Jetons-nous, nous aussi:

La "Lady Margaret"

Le lecteur suit les aventures de Jesse Strange et de sa locomotive la Lady Margaret, du nom d'une femme aimé par ce dernier mais dont l'amour n'avait rien de réciproque. On voyage en ce qui est, dans notre univers, l'Angleterre, transporté par cette locomotive à vapeur roulant, non pas sur des rails mais des routes pavées, tout en découvrant le quotidien des chauffeurs de ces énormes machines, symbole d'un monde à la technologie figée.

Difficile de savoir où on va à bord de la Lady Margaret, ce mélange uchronie/steampunk tombe rapidement en toile de fond pour se focaliser sur le quotidien de Jesse Strange, son passé, ses attentes. J'ai eu parfois l'impression de relire la Bête Humaine, à tel point d'oublier le fait qu'il s'agissait de Science-Fiction. C'est très bien écrit et un peu lyrique, et même si c'est très court (une cinquantaine de pages), j'ai un peu souffert, m'attendant probablement à quelque chose de moins "intime".

Le Signaleur

Pas de téléphone... des sémaphores. Les Signaleurs constituent une "caste" à part entière, officiellement dépendante de la papauté, mais dans les faits, bien plus libre que la Mère Église ne le voudrait. Rafe Bigland va entrer dans cette "guilde" dont le pouvoir semble déterminant.

Une nouvelle qui est bien plus rythmée que la première et ce dés le début. Là encore, on ne sait pas trop dans quel monde nous plonge Keith Roberts. Cette histoire met en avant des hommes mais aussi des sémaphores qui semblent, comme les locomotives, personnifiées. J'ai ajouté une seconde couverture pour pouvoir vous montrer ce que sont ces sémaphores. "Le Signaleur" semble flirter avec la Fantasy, même si un doute persiste, la limite entre magie et progrès technique n'étant pas ici clairement tracée. C'est ce qui fait que sa lecture est prenante.

Frère Jean

Immersion dans le monde des moines lithographes. Frère Jean, missionné par les plus hautes instances de l’Église, se rend au château de Dubris et découvre les horreurs de l’Inquisition. Cette épreuve le tourmente, le fait douter, il flirte dangereusement avec l'hérésie pour tomber dans les bras de la révolte.

Probablement la nouvelle que j'ai préférée. Il y a du Robin des bois dans cette nouvelle, Frère Jean devenant rapidement un héros insaisissable, une sorte de figure christique qui ébranle le pouvoir en place.

Seigneurs et Gentes Dames

Cette nouvelle constitue une sorte de pont entre les personnages de "La Lady Margaret" et la dernière nouvelle du recueil. Jesse ( dont la compagnie de transport a un quasi monopole sur le territoire "britannique") a une nièce, Margaret (décidément) qui fait la connaissance de Robert de Wessex.
Encore une tranche de vie qui se focalise sur les relations entre les différentes couches de la société imaginée par Roberts.

Le Bateau Blanc

Becky pêche dans une baie où elle a grandi aux côtés de son père pêcheur. Sa route semble tracée, elle déplacera des casiers à homards toute sa vie...comme son père. Mais elle rêve d'ailleurs. Et le Bateau Blanc qui vient de jeter l'ancre dans "sa" baie semble la narguer, l'appeler.

C'est très poétique...trop à mon goût. Alors que la révolte gronde, cette parenthèse, si elle évoque une forme d'émancipation, casse un rythme, une dynamique concrétisée dans l'ultime nouvelle du recueil. J'ai trouvé cela long et peu clair, l’héroïne semblant se perdre entre désirs, rêves et réalité.

Corfe Gate

Lady Eleanor ose s'opposer au pouvoir religieux qui a profité d'un voyage au Nouveau Monde du roi pour garder un œil sur les Seigneurs considérés comme hérétiques. Le poids des impôts et la dureté au quotidien due à l'absence de progrès technique pousse Lady Eleanor à ne plus se soumettre. Elle organise les défenses de Corfe Gate et se prépare à son siège.


Vous l'aurez compris, j'ai trouvé les nouvelles rassemblées dans Pavane, assez inégales ( c'est évidemment une question de goût). L'auteur réussit très souvent à faire oublier qu'il s'agit de science-fiction, et je n'arrive toujours pas à savoir si cela constitue un défaut ou une qualité. C'est indéniablement très bien écrit. J'ai lu ( je ne sais plus sur quel site) que ce recueil constituait une des premières uchronies, une des œuvres précurseure ( ouhh la la ! Camille, Carabas! Quel est le féminin de précurseur???) du Steam Punk...

Lecture agréable, Merci à Lisbeï de m'avoir indirectement incité à lire Pavane. Rien ne m'a passionné mais je suis allé au bout

[Lisbeï]

Bel effort. Le fait est que pour moi c'est un classique... même si je serais bien incapable de dire de quoi :-D. Peut-être pas passionnant (mais ce n'est pas un qualificatif qu'on s'attendrait à appliquer à la danse en question, si ?), mais à coup sûr envoûtant. En tout cas pour moi.
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Même le soleil se couche.

[theyoubot]

[Jaipadepseudo]

Et quelles sont, selon toi theyoubot, les premières uchronies?

Et toi, Lisbeï, peux-tu me dire ce qui t'a particulièrement "envouté" dans la lecture de Pavane?

[theyoubot]

[Lisbeï]

Lien très intéressant, merci Theyoubot ! Le bémol est que la liste ne comporte que les auteurs anglo-saxons (je n'y ai pas vu Rêves de Gloire, de RC Wagner, l'exemple le plus récent qui me vienne à l'esprit), voire américains (je n'y ai pas vu non plus Les îles du Soleil, de Ian McLeod), ce qui lui enlève de sa crédibilité.

Et c'est l'atmosphère de Pavane qui m'envoûte, avec ce mélange de modernité et d'archaïsme. C'est d'ailleurs souvent ce que je trouve fascinant dans l'uchronie.
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Même le soleil se couche.

[theyoubot]

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