Posté le: Ven Juil 10, 2009 5:31 pm Sujet du message: Perdido street station - China Miéville
Nouvelle-Crobuzon: une métropole tentaculaire et exubérante, au cœur d'un monde insensé. Humains et hybrides mécaniques y côtoient les créatures les plus exotiques à l'ombre des cheminées d'usine et des fonderies. Depuis plus de mille ans, le Parlement et son impitoyable milice règnent sur une population de travailleurs et d'artistes, d'espions, de magiciens, de dealers et de prostituées. Mais soudain un étranger, un homme-oiseau, arrive en ville avec une bourse pleine d'or et un rêve inaccessible: retrouver ses ailes. Isaac Dan der Grimnebulin, savant fou et génial, accepte de l'aider. Mais ses recherches vont le conduire à libérer une abomination sur la ville tout entière...
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Mon avis pour le tome 1
Par où commencer... Par ma surprise peut-être. Ca ne m'arrive plus si souvent de l'être par un livre, et là, je l'ai été, et plutôt deux fois qu'une. Nouvelle-Crobuzon, la cité où se déroule l'histoire est un monde à elle seule. Et quel monde ! La meilleure image que je peux en donner est celle d'une jungle urbaine tentaculaire, malodorante, dangereuse, mais Ô combien fascinante.
L'action en elle-même est lente à se mettre en place, les choses ne commençant à bouger que vers les dernières pages, mais il serait faux de croire que le livre manque pour autant d'intérêt. Ce premier tome est purement descriptif. Au fil des chapitres, on découvre peu à peu les quartiers, les races, les religions, les différents aspects des règles complexes qui régissent la vie des habitants de Nouvelle-Crobuzon.
La plupart du temps, c'est sombre, noir même et glauque. La misère côtoie la déchéance, l'intolérance et la bigoterie rôdent. La répression dans ses degrés les plus abjectes règne de plein droit, brandissant la terrible menace de la recréation, procédé qui grâce à un usage corrompu, perverti de la thaumaturgie et de la science change ceux qui sont reconnus coupables de crimes en de monstrueuses aberrations.
Généralement, j'ai du mal avec ce genre d'atmosphère, mais là, je suis forcée de m'incliner. C'est vraiment trop bien fait, je ne peux pas ne pas aimer.
Les personnages participent à ma surprise, car on est loin, très loin des stéréotypes des héros "ordinaires" avec entre autre, Isaac, un savant pas très à cheval sur l'étique, Lin, une hybride scarabe perdue entre deux cultures et Yagharek, le mystérieux homme-oiseau qui ne rêve que de retrouver ses ailes.
Il aura fallu tout un tome pour planter le décor, pour mettre en scène tous les personnages. Tout ce fourmillement n'aura été qu'une mise en jambe.
Mon avis pour le tome 2
Je crois qu'aucun livre de Fantasy ne m'aura autant hérissé le poil. Les gorgones comptent parmi les monstres les plus répugnants et les plus effrayants que j'aurais rencontré au cours de mes lectures. La ville entière est en danger; humains, non-humains, hybrides, recréés, personne n'est en sécurité. Pour faire face à ces prédateurs impitoyables, des alliances insolites se mettent en place. Des alliances formées de créatures qui ne se montrent jamais au grand jour, des créatures presque aussi cauchemardesques que les monstres qu'elles veulent éliminer. Entre La fileuse, Le Concile et ses avatars et les Mainmises (ces dernières m'ont complètement révulsée ><" ), j'avais presque l'impression de lire du Fantastique/Horreur. Pour moi qui aime ce genre presque autant que la Fantasy, ce mélange était un vrai régal.
Le deuxième tome est beaucoup plus trépidant que le premier. La chasse à la gorgone est au centre de l'action mais certains fils secondaires du récit m'ont tout de même fichu une sacrée claque.
L'auteur n'est pas partisan des demi-mesures. Pour se débarrasser des monstres en maraude, il n'hésite pas à placer ses personnages devant des dilemmes aux conséquences morales atroces. Certains passages sont tout simplement déchirants.
Mais je dois avouer que si les moyens m'ont fait grincer des dents, les plans mis en œuvre étaient tout simplement brillants, au point que je pardonne aisément le petit ralentissement qu'accuse l'histoire aux deux-tiers de son déroulement.
La fin quant à elle, reflète parfaitement l'esprit du livre; peut-être pas celle que j'aurais voulu, mais parfaitement assortie à l'atmosphère délétère de Nouvelle-Crobuzon. _________________ Mille et un mondes
Dernière édition par Laria le Ven Juil 10, 2009 8:09 pm; édité 1 fois
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Posté le: Ven Juil 10, 2009 5:39 pm Sujet du message:
Superbe critique, Laria . Avec laquelle je suis entièrement d'accord, de surcroît. Je suis contente que ce bouquin t'ait plu. _________________ Même le soleil se couche.
Inscrit le: 30 Juin 2004 Messages: 5671 Localisation: Physiquement : Cergy, France. Mentalement : MIA
Posté le: Sam Juil 11, 2009 9:37 am Sujet du message:
Au fait... pourquoi en Fantasy ? Ca sonne très SF pour moi... _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Posté le: Sam Juil 11, 2009 11:16 am Sujet du message:
Je me suis fait la même réflexion en lisant le résumé^^.
Nouvelle-Crobuzon a un décor et une ambiance très "Steampunk" mais ça n'est en quelque sorte que le cadre de l'histoire alors que la trame du récit s'enroule autour d'éléments - la thaumarturgie, créatures fantastatiques et imaginaires - qui sont de plein pied dans la Fantasy. _________________ Mille et un mondes
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Posté le: Sam Juil 11, 2009 12:19 pm Sujet du message:
A mon avis, ce mélange délibéré des codes de genres considérés généralement comme différents fait partie du style de l'auteur, et, toujours à mon avis, bien sûr, des qualités de ses romans, qui sont difficilement classables. Par exemple, dans Les Scarifiés, où l'on retrouve le même mélange que dans Perdido, il ajoute un élément Fantastique ... _________________ Même le soleil se couche.
Posté le: Dim Juil 12, 2009 12:41 pm Sujet du message:
Je croyais avoir déjà donné mon avis ici, mais en ouvrant le post, je découvre que je confondais avec Les Scarifiés!
Qu'il te faudra lire Laria, juste pour le plaisir de retrouver l'univers de Mieville!
C'est avec Perdido Street Station que j'ai découvert l'auteur, et j'ai moi aussi adoré ces deux volumes. J'aurais moi aussi tendance à voir ce roman plus proche de la SF, malgré les éléments magiques, sans que je parvienne à m'expliquer vraiment pourquoi... le côté steampunk peut-être. _________________ http://journalsemilitteraire.over-blog.com/
Inscrit le: 04 Avr 2005 Messages: 6326 Localisation: Sud
Posté le: Dim Juil 12, 2009 5:27 pm Sujet du message:
Peut-être le côté Steampunk, peut-être aussi la façon dont la "magie" est traitée : comme une science différente, où il s'agit de faire des expériences pour obtenir un résultat. Et angua, si tu n'as pas lu Le Concile de Fer, je te le recommande ;-) ! Il est à mon avis plus proche que Les Scarifiés de Perdido Street Station. _________________ Même le soleil se couche.
Posté le: Dim Juil 12, 2009 8:49 pm Sujet du message:
Crazy a écrit:
Au fait... pourquoi en Fantasy ? Ca sonne très SF pour moi...
Lisbeï a écrit:
A mon avis, ce mélange délibéré des codes de genres considérés
généralement comme différents fait partie du style de l'auteur
Je suppose qu'on peut en effet considérer que toute la production d'un gars
qui considère le polar comme une narration quantique relève de la SF...
Lisbeï a écrit:
Peut-être le côté Steampunk, peut-être aussi la façon dont la "magie" est
traitée : comme une science différente, où il s'agit de faire des expériences
pour obtenir un résultat.
Uh... Je ne suis pas sûr de voir ce que tu entends par "science différente".
(de quoi ? tout résultat nouveau l'est forcément de tous les précédents !)
On peut se donner toutes sortes de critères de scientificité, ou les
assouplir en fonction des disciplines, mais au final, c'est assez tranché :
une démarche est scientifique, ou elle ne l'est pas.
On va retomber dans le débat sur la définition des genres et sous-genres
mais, autant je suis prêt à admettre qu'un jeu délibéré avec la science, ses
mythologies et ses image relève a priori de la science-fiction, autant il ne
suffit pas d'un "savant fou" (qui, par construction, n'a rien de scientifique,
bien au contraire) ou de la mention d'une approche plus ou moins expérimentale
pour parler de science, même si c'est un tour de passe-passe commun chez
bon nombre de auteurs se réclamant de la "science-fantasy". C'est un peu
court : tout le monde, scientifique ou pas, expérimente et apprend de ses
erreurs (et jusqu'aux fourmis...) !
Posté le: Dim Juil 12, 2009 11:03 pm Sujet du message:
Lisbeï a écrit:
Peut-être le côté Steampunk, peut-être aussi la façon dont la "magie" est traitée : comme une science différente, où il s'agit de faire des expériences pour obtenir un résultat. Et angua, si tu n'as pas lu Le Concile de Fer, je te le recommande ;-) ! Il est à mon avis plus proche que Les Scarifiés de Perdido Street Station.
Bon, ben j'ai déplace en SF du coup _________________ Crazy Modératrice et Dictatrice Adjointe Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important (Terry Pratchett)
J'ai un blog, et maintenant, j'ai publié un roman
Pour ce que ça vaut : China Miéville, ses éditeurs, les interviewers anglo-saxons, les extremistes de la SF, les magazines spécialisés, considèrent que ses oeuvres appartiennent au genre Fantasy. _________________ Mon blog
Intéressante interview au Cafard, merci, martlet .
@Caliban : l'un des pièges auxquels je me laisse trop souvent prendre, parler de science avec un scientifique alors que je sais pourtant bien que ça tourne trop souvent au dialogue de sourds ! Ce que j'essayais maladroitement de dire, c'est qu'il n'y a pas de livre de sorts dans Perdido, et que lorsqu'il s'agit d'obtenir un résultat non prévu par la nature (faire voler un être qui a perdu ses ailes, par ex), ça demande une démarche... disons technique. Si "la SF c'est la fantasy avec des boulons", disons qu'il y a énormément de boulons dans Perdido !
Et en disant "science différente" j'avais vaguement en tête les "sciences non causales" ténébranes, mais je sais bien que Ténébreuse est classé en "Science fantasy", et c'est d'ailleurs la seule oeuvre que je connaisse à laquelle cette classification convienne (mais ceci est une autre histoire ). Je ne vais pas me laisser entraîner dans une discussion sur la définition des genres et sous-genres, mais je voulais préciser ma pensée. _________________ Même le soleil se couche.
Pour ce que ça vaut : China Miéville, ses éditeurs, les interviewers anglo-saxons, les extremistes de la SF, les magazines spécialisés, considèrent que ses oeuvres appartiennent au genre Fantasy.
C'est là qu'il est classé dans ma librairie. Mais bon, avec le mélange de genres qui intervient, la balance ne penchera jamais du même côté pour tout le monde. C'est pas très grave au final. En tout cas, ça m'a donné envie de découvrir ce que l'auteur a fait d'autre. _________________ Mille et un mondes
Posté le: Jeu Juil 16, 2009 11:42 am Sujet du message:
Lisbeï a écrit:
Si "la SF c'est la fantasy avec des boulons"
Citation:
je sais bien que Ténébreuse est classé en "Science fantasy", et c'est d'ailleurs
la seule oeuvre que je connaisse à laquelle cette classification convienne
Pocket avait aussi créé une étiquette spécifique pour les romans d'Anne McCaffrey.
Elle est aussi revendiquée, en France par des gens comme Nicolas Cluzeau,
et Nestiveqnen a publié une paire de recueils sous ce label (il se peut même
que j'y aie aussi commis une médiévalerie ou une autre — un truc d'avant
l'invention du boulon, quoi !).
Mais sur le fond, nous sommes d'accord : elle est le plus souvent employée
à tort et à travers...
Posté le: Sam Déc 24, 2011 10:31 pm Sujet du message:
Relu avec beaucoup de plaisir : l'intrigue et ses enjeux sont intenses, le cadre fascinant. Je regrette un peu la complaisance de Miéville dans certaines scènes gores (je ne suis pas particulièrement prude, mais parfois, un sous-entendu a la puissance de mille descriptions cliniques, et il est souvent moins chiant aussi – avis personnel) et la traduction qui m'a semblé parfois défaillante (les antécédents de certains pronoms ne se laissent pas deviner facilement).
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