Inscrit le: 12 Avr 2006 Messages: 5856 Localisation: deuxième étoile à droite et tout droit jusqu'au matin...
Posté le: Ven Oct 09, 2020 8:11 am Sujet du message: Ganaha - Florent Toniello
C'est un matin comme tous les autres dans l'Oasis. Ganaha réveille son compagnon, ils déjeunent, partent travailler avant la période de jeu et d'étude... Monde clos isolé entre mer et désert, l'Oasis est un havre de paix et de sérénité. Les êtres vertes y vivent en communauté rurale, un quotidien immuable rythmé par les cloches des heures et les préceptes du Livre. Ils ont banni le progrès technologique qui a causé la chute du monde d'avant. Ils vivent dans l'instant présent, sans curiosité pour autre chose. L'Oasis qui fut est l'Oasis qui sera.
Bien loin de là dans le temps, Enaris a également une vie paisible et bien réglée. Mais la sienne est soumise à la volonté du Cénacle, le pouvoir de centralisation des intelligences artificielles, qui fait tous les choix à sa place, jusqu'au parfum de sa nourriture. Entraînées par les humains, les machines sont devenues de plus en plus intelligentes. Elles ont colonisé les étoiles et visent le contrôle total de l'univers. La population humaine a été régulée et vit parquée comme dans un zoo, chaque humain isolé dans sa maison. Le Cénacle pourvoit à tous ses besoins, mais s'assure également de sa docilité.
Mais décidément, le Cénacle ne voit plus trop l'intérêt des humains, malgré tout le respect qu'il assure avoir pour ses créateurs. Il a décidé de se débarrasser du dernier millier restant en l'expédiant dans le temps, à l'époque de l'Oasis. Enaris sera son éclaireuse à bord de sa capsule temporelle, et ouvrira la voie à ses semblables.
L'Oasis et le monde du Cénacle sont comme des échos l'un de l'autre. Les deux assurent paix et bien-être à leurs habitants. Le premier est pourtant connecté à la nature, tandis que le deuxième est ultra-technologique. Le premier autorise une certaine souplesse avec les règles de vie commune, tandis que le deuxième impose un strict emploi du temps.
Dans les deux cas, une des libertés accordées aux êtres les plus indépendantes, qui se satisfont mal de cette vie monotone, est la poésie. Celle de Ganaha est faite de strophes mesurées et partagée avec ses proches ; celle d'Enaris aligne les vers non structurés, immédiatement archivés par le Cénacle sans que jamais personne n'en prenne connaissance... Les deux poétesses vont tout de suite devenir amies malgré leur évolution si différente.
Ganaha fait partie de ces ouvrages auxquels je n'aurais probablement pas accordé un deuxième regard si je l'avais croisé sur un rayonnage. Entre la couverture qui évoque plus la littérature générale que l'imaginaire, et la promesse d'une langue poétique qui me ferait plutôt reculer, je ne m'y serais sans doute pas arrêtée. Cela aurait pourtant été dommage, car j'ai en fait pris grand plaisir à ma lecture.
L'imaginaire est bien présent. Les intelligences artificielles sont devenues ultrasophistiquées et ont atteint un niveau supérieur d'évolution. La société dirigée par les machines, et la recherche d'une époque où l'humanité pourrait pleinement s'épanouir, m'a évoqué Matrix, et d'autres aspects également. L'hégémonie des machines, et leur usage du voyage dans le temps à des fins qui leur sont propres, m'a également fait penser à Terminator. Bref, si cette œuvre ne fait que me rappeler ces films culte, elle tisse habilement les éléments science-fictifs en une intrigue finalement pas si évidente.
La plume de Florent Toniello est belle, travaillée mais sans excès. La poésie n'est présente que dans les brèves citations des poétesses, et ne devrait pas déranger les lecteurs qui y sont réfractaires. Le rythme est lent, le suspense absent, mais on se prend malgré tout au jeu de deviner où tout cela va mener... Le roman s'intéresse tantôt à plusieurs habitantes de l'Oasis (qu'elles soient masculines ou féminines, car dans l'Oasis c'est le féminin qui prime dans les accords), tantôt à Enaris ; des interludes présentent un récit raconté par un ancien conteur de l'Oasis, dont on ne comprendra la finalité et le lien avec l'histoire principale qu'à la toute fin. Tout est bien dosé, et comme finalement l'ouvrage n'est pas très gros, c'est un livre qui se lit rapidement.
Un passage m'a fait un peu tiquer : Hadvir part en expédition dans le désert avec deux poneys... mais revient avec deux ânes. Ou alors est-ce une modification de la réalité / rêve que je n'ai pas su apprécier à sa juste valeur ?
Ganaha est pour moi une agréable découverte, qui a su m'intéresser et me surprendre sans que je l'aie vu venir. Avis aux amateurs de bonne science-fiction française !
Chronique réalisée pour Les Chroniques de l'Imaginaire. _________________ Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.
Posté le: Ven Oct 09, 2020 10:58 pm Sujet du message: Re: Ganaha - Florent Toniello
Soleil* a écrit:
Un passage m'a fait un peu tiquer : Hadvir part en expédition dans le désert avec deux poneys... mais revient avec deux ânes
Les quadupèdes domestiqués sont plein de surprises. Par exemple, dans les pâturages français, il n'y a que des vaches. Mais dans les restaurants, on ne sert que du boeuf. Peut être la vache change-t-elle de sexe en mourant.
Inscrit le: 27 Juin 2011 Messages: 3327 Localisation: Great North
Posté le: Sam Oct 10, 2020 2:45 pm Sujet du message: Re: Ganaha - Florent Toniello
theyoubot a écrit:
Soleil* a écrit:
Un passage m'a fait un peu tiquer : Hadvir part en expédition dans le désert avec deux poneys... mais revient avec deux ânes
Les quadupèdes domestiqués sont plein de surprises. Par exemple, dans les pâturages français, il n'y a que des vaches. Mais dans les restaurants, on ne sert que du boeuf. Peut être la vache change-t-elle de sexe en mourant.
Dans le cas du boeuf, à l'origine, il s'agit d'un taureau castré... _________________ "Tout est dans tout et réciproquement ."
Posté le: Sam Oct 10, 2020 9:05 pm Sujet du message:
Ouais, d'où la blague. Mais je suis de mauvaise foi car quand on désigne la viande et non pas l'animal, le terme englobe les deux sexes. Et du coup, ma digression garde un lien avec la littérature.
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