[Nouvelles] L'Homme de demain - Les Artistes Fous

[Soleil*]

(Chronique réalisée pour Les Chroniques de l'Imaginaire)

Les Artistes Fous Associés, c’est quoi ? Une association diffusant les (chefs d’)œuvres d’amateurs incompris. Avec un rythme de parution d’une anthologie par an, voici la quatrième d’entre elles : L’Homme de demain, qui rassemble plusieurs nouvelles imaginant le futur de l’Humanité. Ces textes sont pour la plupart assez courts, et illustrés en première page d’un dessin original (pas trop à mon goût dans l’ensemble, mais c’est quand même agréable d’avoir des illustrations).

A noter une initiative intéressante pour ceux qui veulent découvrir les ouvrages de l’association : si la version papier des ouvrages est payante, la version numérique (format epub) est pour sa part disponible gratuitement au téléchargement. Avis aux amateurs !

Mais passons maintenant au contenu du recueil :

La frontière des rêves, de Tesha Garisaki
Omn-IA est une intelligence artificielle qui assiste les gens au niveau individuel mais prend également en charge l’administration de ses zones d’influence. Ce n’est pas un dieu tout-puissant, seulement un outil au service de l’humanité, mais il fait peur aux quelques peuples indépendants qui subsistent encore. Mais s’il rend les gens connectés heureux, n’est-ce pas le principal ?
Une jolie nouvelle avec une bonne idée derrière. Il manque un petit quelque chose pour que ce soit exceptionnel, mais ça reste très sympathique.

Vintage Porn Star, de Mathieu Fluxe
Après qu’un virus a décimé la quasi-totalité de la population enfantine, le crédo est à la procréation à tout prix. Finis, la contraception, l’avortement ou même le porno, sexe sans finalité de conception. Mais que pensent les rares jeunes gens de ces contraintes sociales ?
Intéressant, mais un peu décousu et difficile à suivre.

Paradise4, d’ Émilie Querbalec
Jusqu'où peuvent aller des parents pour assurer un avenir à leur enfant dans un monde où la nanogale condamne à terme toute l’humanité ?
Encore une nouvelle qui m’a peu touchée, car j’ai mis du temps à comprendre de quoi il retournait, il y a trop d’éléments nouveaux à appréhender en trop peu de pages.

Maison close, de Neil Jomunsi
Programmés à l’image des humains pour ressentir des désirs, les robots de dernière génération sont avides de sensations. Miss A l’a bien compris, qui a fait fortune avec une chaîne de love rooms destinés aux machines. Elle-même ne pratique plus… mais comment refuser la proposition au montant astronomique qui lui est faite par un mystérieux client pour qu’elle se charge elle-même de le satisfaire ?
A partir de quand une machine cesse-t’elle d’être une machine ? Il semble ici que la barrière soit bien fine entre humanité et intelligence artificielle, avec des androïdes qui rêvent de plaisirs charnels… Une nouvelle sympathique.

Ergo sumus, de Nunzio Cusmano
Parce qu’il était stérile et ne pouvait lui donner d’enfant, sa femme l’a quitté. Et le savant s’est lancé dans une quête pour transmettre ses gènes à tout prix…
Dans ce texte, raconté à la première personne par le savant fou, on rentre peu à peu dans ses pensées, son parcours. Tel un alchimiste, il voulait réaliser une Œuvre délirante… La tension monte peu à peu jusqu'à un final attendu mais qui n’en fait pas moins froid dans le dos.

Caraville, de Nelly Chadour
Le mouvement, c’est la vie, l’inertie, c’est la mort. Caraville, gigantesque assemblage d’automaisons, se carapate sans fin, avançant vaillamment sur la route pour fuir le Grand Brasier qui anéantit toute vie. Une automaison en panne de carburateur, ça signifie être laissé à la mort sur le Bas-Côté…
Cette nouvelle, dont le thème n’est pas sans évoquer Le monde inverti de Christopher Priest, est la première de l’anthologie à m’avoir vraiment beaucoup plu. La fin est sans grande surprise, mais c’est agréable à lire, il y a du rythme et une héroïne sympathique.

Le coeur sous la cloche, de Ludovic Klein
Ne pas s’écarter de la route. Marcher entre les plots. Demander avant de toucher quoi que ce soit. La liste de règles de vie est interminable. Une prison sans barreau, pour une petite fille qui ne demande qu’à vivre.
Un texte poignant sur la survie en territoire contaminé, qui ne peut que toucher un public encore ébranlé par la catastrophe nucléaire de Fukushima !

Les Héritiers, d’ Anthony Boulanger
A force de radiations, les habitants de la Terre ont muté. Désormais Augmentés, ils aspirent à de nouveaux départs sur des planètes qui leur correspondent mieux. Peu à peu, les diverses communautés s’en vont, il ne restera bientôt plus qu’un seul homme, le seul être humain né non Augmenté.
Encore un très beau texte, sur le départ vers les étoiles de l’Humanité et sur la solitude de celui qui reste, seul, sur notre monde où l’Humanité est sur le point de céder la place….

La musique des sphères, de Nicolas Chapperon
Flottant parmi les étoiles, d’une source d’énergie à une autre, les Humains du lointain futur ont fini par perdre tout contact avec les autres membres de leurs espèces. Des messages échangés à plusieurs siècles d’intervalle, voilà toutes les interactions sociales qui leur restent. Phyllis s’apprête pourtant à faire une rencontre physique, probablement la seule qu’elle fera dans toute sa vie…
Solitude encore pour cette nouvelle qui nous montre la vanité d’une vie sans but et sans amis, conséquence de l’adaptation de l’Humanité à une vie dans l’espace.

Poogle Man, de Herr Mad Doktor
Poogle-Maps vous fournit des itinéraires. Poogle-Arithmétiques calcule pour vous. Poogle-Clear-View corrige votre myopie. Poogle-Memories se rappelle de vos souvenirs pour vous. Mais attention à la Google-Police, qui surveille vos pensées !
Dans un monde hyper-connecté, Poogle est omniprésent. C’est simple, Poogle fait tout à la place des humains, y compris penser ! Mais est-il encore possible de se déconnecter ? de se rebeller ? L’idée de base de la nouvelle est intéressante, mais j’avoue avoir été écœurée par la narration basée sur d’incessantes « notes de bas de page » : au format électronique, c’est lourdingue (d’autant que certains hyperliens sont erronés).

L’absurde et très courte histoire de l’homme qui voulait monter dans la hiérarchie, de Corvis
Pour ce texte, je ne vous mets pas de résumé, car il serait aussi long (court ?) que la nouvelle. « Absurde » est le maître mot, en tout cas moi je n’ai guère été convaincue.

Changez d’air, d’ Arnaud Lecointre
Face à une usine qui pollue intensivement, certains se décident à porter constamment sur le visage un masque intégral relié à un approvisionnement en air pur. Jusqu'à ce qu’ils ne puissent plus payer, bien sûr.
Pas grand-chose à dire sur ce texte, bien écrit mais qui reprend une idée que j’avais déjà vue à plusieurs reprises y compris dans sa chute.

La vengeance du XIXe siècle, de Maniak
La guerre est terminée, elle a laissé la femme infirme : à la place de sa jambe, il y a une prothèse en plastique très laide. C’est pourquoi elle se laisse tenter par une prothèse de bois aperçue chez un antiquaire.
Bof, voilà une nouvelle qui ne m’a pas parlé du tout, je ne suis d’ailleurs pas sûre d’avoir vraiment compris.

Patrino, de Vincent Leclercq
Le nombre de ses habitants ayant augmenté, Patrino - la Ville - est devenue enceinte. Un événement exceptionnel, puisque la dernière naissance de Ville remonte à si longtemps qu’elle a été oubliée. Mais Patrino souffre ; des médecins humains s’engouffrent donc dans ses entrailles pour essayer de la soulager.
Plongée dans un corps urbain à l’image d’un corps humain gigantesque, pour cette nouvelle. Sympathique, mais un peu long par rapport au contenu.

Moisson, de Gallinacé Ardent
ILS sont venus. ILS ont transformé les humains, libres de marcher sur leur terre, en matière première, en plantes que l’on fait pousser puis que l’on moissonne.
Dans ce récit, l’Humanité a rencontré la vie extraterrestre… et la rencontre ne s’est pas très bien passée. Un avenir bien cauchemardesque, décrit dans un texte saisissant.

Les enfants de nos enfants, de Southeast Jones
Évolution : mutations. Évolution : immortalité. Évolution, encore et encore…
Cette ultime nouvelle clôt le recueil en beauté. Elle voit loin, très loin dans l’avenir, bouclant la boucle de l’évolution « humaine ».

Au final, c’est une anthologie pas désagréable à lire, avec des idées (globalement bien sombres) sur l’avenir de l’Humanité qui ont donné naissance à des nouvelles vraiment très variées, mais qui ne me laissera pas un souvenir impérissable.
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Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.

[Soleil*]

A noter que vous trouverez sur leur site l'accès au libre téléchargement de leurs autres anthologies, sur les sujets suivants :
- Folie(s)
- Sales bêtes
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Il s’évanouit tout doucement à commencer par le bout de la queue,
et finissant par sa grimace qui demeura quelque temps après que le reste fut disparu.