D'accord avec Valéry! Elle sert à rien la marquise!
0%
[ 0 ]
D'accord avec Artaud! La marquise est importante si j'arrive à y croire!
100%
[ 2 ]
D'accord avec ni l'un ni l'autre! (Merci de développer)
0%
[ 0 ]
Total des votes : 2
Auteur
Message
aCOSwt
Inscrit le: 09 Mar 2015 Messages: 24
Posté le: Lun Aoû 03, 2015 7:55 am Sujet du message: La marquise sortit à cinq heures!
Bonjour,
Le titre phatidique de cette contribution n'est là que pour recueillir votre opinion sur un maintenant vieux débat.
Dans ses cahiers, Paul Valéry griffonne :
«Roman. L'arbitraire - La comtesse prit le train de huit heures. La comtesse prit le train de neuf heures. Ad lib. Or ce que je puis varier ainsi indéfiniment, dans le mou - Le premier imbécile venu peut le faire à ma place, - le lecteur. Mais ce à quoi je ne trouve pas de substitut - ce qui est nécessaire pour moi - voilà mon affaire. »
Plus tard, Artaud proteste :
«Cela ne me gêne pas du tout moi, que l'on dise de madame la comtesse, qu'elle est sortie à trois heures, si je parviens à croire qu'elle existe et qu'elle est sortie.»
Alors voilà. Vous sentez-vous plus proche de Valéry, plus proche d'Artaud ou... ailleurs ?
Posté le: Lun Aoû 03, 2015 10:00 am Sujet du message:
L'histoire a tranché. La poésie est devenue une forme d'art marginale et le roman est sous les feux de la rampe. Je consomme 0% de poésie et 100% de romans, donc je ne peux que rappeler les mérites de ce dernier. J'ai le renfort de plusieurs décennies de romans extraordinaires qui n'existaient pas quand ce débat a eu lieu.
Je conçois que Breton (qui prête à Valéry cette opinion tranchée) ait vu les choses d'un autre oeil. Les romans balzaciens n'étaient pas forcément enthousiasmants et lui même était un poète. Mais les tentatives de hiérarchies entre formes d'art me semblent quand même oiseuses.
Posté le: Lun Aoû 03, 2015 10:18 am Sujet du message:
D'abord merci pour ta contribution.
theyoubot a écrit:
Breton (qui prête à Valéry cette opinion tranchée)
Juste au passage pour la parenthèse : Breton s'est effectivement positionné sur le sujet mais cette opinion est bien, telle que citée dans le message précédent, celle de Paul Valéry.
On la retrouve dans ses cahiers que l'on peut consulter (j'en profite un peu pour faire la réclame pour des initiatives louables : http://valery.item.ens.fr/index/cahiers_index.htm )
theyoubot a écrit:
Mais les tentatives de hiérarchies entre formes d'art me semblent quand même oiseuses.
Dans le départ de la controverse, je n'ai pas lu cette velléité de hiérarchisation. Je crois que l'on peut sans souci tenir les premiers instigateurs pour largement au-dessus de cela.
Et dans tous les cas, je n'ai pas posté ce sondage dans cette intention.
Posté le: Lun Aoû 03, 2015 11:36 am Sujet du message:
lily cocci a écrit:
et puis, c'est une comtesse ou une marquise ?
C'est bien ça la question!
Tu as d'un coté, avec PV, ceux qui disent qu'on s'en fout pas mal. Que ce soit une comtesse ou une marquise, qu'elle sorte à 3, 7 ou 9 heures... cela n'apporte rien de fondamental puisque je peux écrire n'importe quoi et le résultat sera identique et que ce type de phrase est par conséquent dénué de toute valeur littéraire.
Et d'un autre, ceux qui avec Artaud, pensent que, si il est possible de croire en l'existence du personnage (de la scène, de l'histoire...) ce type de phrase n'est pas nécessairement sans valeur.
Pour la petite histoire qui justifie la marquise dans le titre alors... que les protagonistes parlent de comtesse... "La marquise sortit à cinq heures" est le titre d'un roman écrit par Claude Mauriac (avec l'intention de relever le défi)
ceux qui avec Artaud, pensent que, si il est possible de croire en l'existence du personnage (de la scène, de l'histoire...) ce type de phrase n'est pas nécessairement sans valeur.
Bien qu'Artaud soit dans mon camp, je note quand même qu'il avait des raisons personnelles de combattre la théorie opposée défendue par les surréalistes.
va quand même falloir tout reprendre depuis le début si tu veux de l'auditoire.
je vois un peu où l'on va, mais je voudrais bien savoir d'où on est parti et par où on est passé.
je vois bien que tu maîtrises ton sujet, 'est très bien. mais il faut vulgariser ton propos et ne pas perdre à l'esprit que tu parles à des (ou au moins une) néophytes.
pour l'instant je suis du côté de la marquise parce qu'avec elle tout va toujours très bien. je me méfie beaucoup plus des comtesses.
La marquise de Monte Cristo, La comtesse de Clèves, La princesse perchée, La baronne Margot, La reine sans divertissement, ça en fait des titres (dans les deux sens du terme) à écrire... _________________ "Tout est dans tout et réciproquement ."
va quand même falloir tout reprendre depuis le début si tu veux de l'auditoire.
Je n'ai jamais cherché un auditoire. Et... j'ai toujours bien appliqué les leçons des maîtres... c'est à dire... de ceux qui... ont loué Homère pour ne pas avoir commencé son histoire... ab ovo. (c'est dans les pages roses )
lily cocci a écrit:
je vois un peu où l'on va
Si on c'est je alors... on ne va nulle part!
Je n'ai pas la moindre intention de conclure quoi que ce soit CQFD.
D'ailleurs... je n'ai même pas voté...
Je suis juste curieux de l'opinion d'avides lecteurs contemporains. (Ce que je ne suis pas. (ni avide, ni contemporain ) et crois pouvoir trouver ici.)
lily cocci a écrit:
je vois bien que tu maîtrises ton sujet
Je ne maîtrise rien du tout, je suis juste : curieux.
lily cocci a écrit:
il faut vulgariser ton propos et ne pas perdre à l'esprit que tu parles à des (ou au moins une) néophytes.
J'ai toujours tenu, et je crois à raison, à toujours faire confiance à mon lecteur pour savoir écrire les lignes que je n'écris pas.
En d'autres termes... à ne jamais le prendre pour un con.
Je veux dire aussi, hic & nunc, que si j'explique plus, je ne pourrai qu'influencer l'opinion.
lily cocci a écrit:
pour l'instant je suis du côté de la marquise parce qu'avec elle tout va toujours très bien. je me méfie beaucoup plus des comtesses.
Inscrit le: 04 Avr 2005 Messages: 6326 Localisation: Sud
Posté le: Mar Aoû 04, 2015 6:24 am Sujet du message:
Je pense que dans tout roman il y a des éléments arbitraires et d'autres qui ne le sont pas. Et seul le lecteur peut les différencier, d'autant que cela dépend aussi du genre du roman.
Par exemple, imaginons que la comtesse/marquise soit la bien-aimée du personnage principal du roman, et que le foutu train qu'elle a pris à quelque heure que ce soit échappe de justesse à l'explosion de la gare une demi-heure après, le détail peut être arbitraire (quoique... l'explosion de la gare à une heure donnée peut être conditionnée par des raisons propres au romancier, et possiblement pour ajouter de la vraisemblance au récit), mais il n'en sera pas moins important.
Par ailleurs, certains auteurs donnent une foultitude de détails sur certains personnages juste avant de les assassiner sans remords ni regret apparents. On pourrait dire que c'est arbitraire, mais pour moi ça donne du corps et de l'intérêt à leur intrigue et à leurs autres personnages par voie de conséquence.
Mais que vient faire la poésie là-dedans ??? Je pensais que Valéry et Artaud parlaient tous deux du roman ? En tout cas, je suis sans doute plutôt d'accord avec Artaud :-). _________________ Même le soleil se couche.
Posté le: Mar Aoû 04, 2015 6:45 am Sujet du message:
aCOSwt a écrit:
je n'ai pas lu cette velléité de hiérarchisation
C'est pourtant l"idée de base
aCOSwt a écrit:
on peut sans souci tenir les premiers instigateurs pour largement au-dessus de cela.
Ils ne l'étaient pas, visiblement. Leur seule excuse est leur absence de recul.
lily cocci a écrit:
peux-tu introduire ta question s'il te plaît ?
Valéry disait ne pas vouloir écrire de roman, parce qu'il ne voulait pas avoir à écrire un jour une phrase aussi inintéressante que La marquise sortit à cinq heures. Une phrase que le premier imbécile venu pouvait écrire. Aux romans balzaciens qu'il jugeait médiocres, il opposait la beauté formelle de la poésie, affranchie de l'étroitesse d'une narration factuelle. Dans cet esprit, Breton estimait que le roman était une forme d'expression mineure qui ne saurait rivaliser avec la poésie. Dans ses écrits, il a largement développé cette thèse, symbolisée par la phrase La marquise sortit à cinq heures. Au XX° siècle, le roman a démontré sa richesse. Comme je l'ai dit plus haut, Breton tentait d'établir une hiérarchie entre deux formes d'art, poésie et roman, et le ridicule de sa tentative le fait un peu passer aujourd'hui pour un vaniteux ou un imbécile (ou les deux).
Inscrit le: 27 Juin 2011 Messages: 3327 Localisation: Great North
Posté le: Mar Aoû 04, 2015 8:57 am Sujet du message:
Je dois être un imbécile puisque nombre de mes romans préférés font la part belle à la poésie en prose...
D'ailleurs, pour ma Pomme, les plus grands romanciers sont ceux qui travaillent la langue au point que la forme répond au fond par des correspondances que Baudelaire ne renierait pas.
C'est ainsi que le sieur Dumas dans le comte de Monte Cristo écrivit quelques pages sublimes sur le réveil de Franz dans la grotte ou sur l'exécution publique à Venise :
"C’étaient bien les mêmes statues riches de forme, de luxure et de poésie, aux yeux magnétiques, aux sourires lascifs, aux chevelures opulentes. C’étaient Phryné, Cléopâtre, Messaline, ces trois grandes courtisanes ; puis au milieu de ces ombres impudiques se glissait, comme un rayon pur, comme un ange chrétien au milieu de l’Olympe, une de ces figures chastes, une de ces ombres calmes, une de ces visions douces qui semblait voiler son front virginal sous toutes ces impuretés de marbre.
Alors il lui parut que ces trois statues avaient réuni leurs trois amours pour un seul homme, et que cet homme c’était lui, qu’elles s’approchaient du lit où il rêvait un second sommeil, les pieds perdus dans leurs longues tuniques blanches, la gorge nue, les cheveux se déroulant comme une onde, avec une de ces poses auxquelles succombaient les dieux, mais auxquelles résistaient les saints, avec un de ces regards inflexibles et ardents comme celui du serpent sur l’oiseau, et qu’il s’abandonnait à ces regards douloureux comme une étreinte, voluptueux comme un baiser.
Il sembla à Franz qu’il fermait les yeux, et qu’à travers le dernier regard qu’il jetait autour de lui il entrevoyait la statue pudique qui se voilait entièrement ; puis, ses yeux fermés aux choses réelles, ses sens s’ouvrirent aux impressions impossibles." (ch. 32)
"Le monte Pincio semblait un vaste amphithéâtre dont tous les gradins eussent été chargés de spectateurs ; les balcons des deux églises qui font l’angle des rues del Babuino et de la rue di Ripetta regorgeaient de curieux privilégiés ; les marches des péristyles semblaient un flot mouvant et bariolé qu’une marée incessante poussait vers le portique : chaque aspérité de la muraille qui pouvait donner place à un homme avait sa statue vivante.
Ce que disait le comte est donc vrai : ce qu’il y a de plus curieux dans la vie est le spectacle de la mort.
Et cependant, au lieu du silence qui semblait commander la solennité du spectacle, un grand bruit montait de cette foule, bruit composé de rires, de huées et de cris joyeux ; il était évident encore, comme l’avait dit le comte, que cette exécution n’était rien autre chose, pour tout le peuple, que le commencement du carnaval.
Tout à coup ce bruit cessa comme par enchantement, la porte de l’église venait de s’ouvrir." (ch. 35)
On pourrait poursuivre avec Nabokov, Garcia Lorca, Cohen, du Maurier, et...
La littérature cloisonnée, c'est bon pour les manuels antiques, et encore, nombre d'entre eux ont souligné les passerelles entre les différents genres , voire leurs fusions. _________________ "Tout est dans tout et réciproquement ."
Posté le: Mar Aoû 04, 2015 10:21 am Sujet du message:
merci le youbot c'est bien gentil de m'expliquer. c'est clair maintenant.
je me retire de la conversion pour vous lire et tenter d'en apprendre plus sur la question.
si vous croisez Hic et Nunc, dîtes leur que je suis avec la marquise. s'ils veulent passer boire un verre, c'est avec plaisir.
Posté le: Mar Aoû 04, 2015 12:16 pm Sujet du message:
Hoël a écrit:
nombre de mes romans préférés font la part belle à la poésie en prose...(...) La littérature cloisonnée, c'est bon pour les manuels antiques, et encore, nombre d'entre eux ont souligné les passerelles entre les différents genres , voire leurs fusions.
Tu prêches une convertie. C'est à Breton que tu dois dire ça. Mais il va te falloir une bonne machine à voyager dans le temps. La question que je me pose c'est : pour justifier sa condamnation de cette forme d'expression qu'est le roman, Breton considérait il tes exemples comme l'exception qui confirme la règle ? Ou comme de piètres exercices littéraires ? Dans les 2 cas, ça semble assez indéfendable.
lily cocci a écrit:
si vous croisez Hic et Nunc, dîtes leur que je suis avec la marquise. s'ils veulent passer boire un verre
Je préciserai qu'ils doivent passer avant cinq heures.
Vous ne pouvez pas poster de nouveaux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum Vous ne pouvez pas éditer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas supprimer vos messages dans ce forum Vous ne pouvez pas voter dans les sondages de ce forum
Commandez vos livres sur Internet avec le Coin des Lecteurs => ici