Posté le: Sam Mai 03, 2014 7:56 pm Sujet du message: La Peur - Gabriel Chevallier
L'histoire
L'auteur prend les traits de Jean Dartemont et raconte la guerre 14-18, enfin SA guerre alors qu'il n'a pas vingt ans.
Mon Avis
J'ai avant tout été heureusement surpris par la grande qualité d'écriture de Gabriel Chevallier, sa capacité à décrire les hommes, les ambiances et surtout les peurs. S'il n'était pas nécessaire de me rappeler que la guerre est une horreur indescriptible, ce roman historique le montre avec un fatalisme et un cynisme certains.
Ce qui m'a choqué c'est le sentiment d'esclavage que ressentent les soldats qui ne savent pas pourquoi ils sont là et surtout pourquoi ils se battent.
L'enfer des tranchées y est décrit avec son lot d'anecdotes sur la boue, le froid, la faim, les maladies, les poux, les rats, les gaz, les mitrailleuses...Car Chevallier raconte des histoires, celles qu'il a vécu et celles qu'on lui a raconté.
Mais il nous raconte avant tout la peur, cette effroyable fatalité et cette terrible impuissance devant les pluies d'obus qui restent selon lui, la plus terrible des adversités. Les obus viennent de n'importe où, explosent n'importe quand, touchent n'importe qui, qu'ils soient lancés par les allemands ou par les arrières-lignes françaises. Il décrit ce sentiment avec une image qui m'a marquée, je cite: " Le corps geint, bave et se souille de honte. La pensée s'humilie, implore les puissances cruelles, les forces démoniaques. Le cerveau hagard tinte faiblement. Nous sommes des vers qui se tordent pour échapper à la bêche."
L'auteur décrit tout le paradoxe qu'il doit subir au quotidien. Il exècre toute forme d'autorité, de violence et de soumission tout en étant régulièrement victime, acteur et complice. Il décrit la vie à l'arrière, le jugement de ceux qui ne se battent pas, la vindicte populaire, le patriotisme primaire qui n'a plus aucun sens , ne donne aucune force, aucun courage, aucun idéal sur le front. Les critiques sont acerbes contre les généraux incapables, les chefaillons tyranniques, les héros qui n'existent pas "car les vrais héros sont morts". Le boche n'est pas haï, il est au loin, ou tout proche, on entend parler de lui, et si on croise son regard on espère que celui-ci est celui d'un cadavre, car pourquoi le tuer? pour quelle raison? pourquoi ôter la vie d'un homme qu'on ne connait pas, et qui est probablement perdu comme vous, apeuré comme vous?
La guerre est une horreur qui broie l'individu, lui enlève toute dignité, et pousse ce dernier à se terrer, et ne souhaiter qu'une chose: vivre un instant de plus, et espérer fuir cet enfer.
Une lecture terrible, enrichissante et captivante.
Posté le: Jeu Aoû 14, 2014 6:15 pm Sujet du message:
Encore un roman que j'ai lu sous la contrainte et que j'ai détesté.
Je dois dire que je l'ai commencé à reculons parce que le sujet ne m’enthousiasmait pas et que je retrouvais mes traumatismes enfantins liés à la visite de Verdun, à l'ossuaire et autres joyeusetés. Pour une enfant de 10 ans, le choc fut rude.
Or, j'ai vraiment tout retrouvé avec ce roman et, même si je reconnais que ces témoignages historiques sont nécessaires, ce n'est vraiment pas une lecture que j'ai appréciée. Curieusement, je lui ai préféré Le Feu de Barbusse ou même Les Croix de bois de Dorgelés. Allez savoir pourquoi.
Inscrit le: 27 Juin 2011 Messages: 3327 Localisation: Great North
Posté le: Jeu Aoû 14, 2014 11:02 pm Sujet du message:
Camille a écrit:
Encore un roman que j'ai lu sous la contrainte et que j'ai détesté.
Je dois dire que je l'ai commencé à reculons parce que le sujet ne m’enthousiasmait pas et que je retrouvais mes traumatismes enfantins liés à la visite de Verdun, à l'ossuaire et autres joyeusetés. Pour une enfant de 10 ans, le choc fut rude.
Or, j'ai vraiment tout retrouvé avec ce roman et, même si je reconnais que ces témoignages historiques sont nécessaires, ce n'est vraiment pas une lecture que j'ai appréciée. Curieusement, je lui ai préféré Le Feu de Barbusse ou même Les Croix de bois de Dorgelés. Allez savoir pourquoi.
Parce que c'était de l'instantanéité , du vécu qui prenait aux tripes , au même titre qu'A l'ouest rien de nouveau de Remarque ou Capitaine Conan de Vercel , ces gens-là ont vécu des atrocités mais ont avant tout parlé de leur camaraderie , de leur désir de survivre , pas d'une vaine complaisance morbide dont on abreuve nos sillons depuis tant de mois. _________________ "Tout est dans tout et réciproquement ."
Inscrit le: 09 Nov 2014 Messages: 11 Localisation: Ardèche
Posté le: Mar Nov 11, 2014 9:24 pm Sujet du message:
"La Peur": un roman très fort sur la grande guerre ! Je partage l'avis de Jaipasdepseudo. En ce jour de 11 novembre, il est important de ne pas oublier les leçons de l'histoire et la littérature a également cette fonction. A lire également: "Champs d'honneur" de Rouaud, "Le grand troupeau" de Giono.
Et en effet, "A l'ouest rien de nouveau" : témoignage inoubliable ! _________________ "Chaque mot écrit est une victoire contre la mort."
M. Butor
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